A l’aube du 7ème album, analyse la discographie de Kanye West.
Il y a quelques mois, à l’occasion de la sortie de Compton je me posais la question : « Rétrospectivement, que vaut l’album 2001 de Dr Dre ? ». Certes le contenu n’a pas fait l’unanimité (certains allant jusqu’à parler de révisionnisme) mais l’idée principale était de rappeler que LE classique de Dre était The Chronic et non 2001. Bref, cette fois je m’attaque à la discographie de Kanye West. Le monsieur sortira un album au cinoche avec un nom tiré dans une pochette surprise le 11 février…
Et je crois que qu’il serait bon de mettre de coté son image désastreuse pour revenir à l’essentiel. La musique.
Entre Kim Kardashian, son amie Rihanna et ses sorties médiatiques plus qu’hasardeuses on ne peut pas dire qu’il donne envie de l’aimer. Ces éléments font qu’aujourd’hui il n’est plus jugé en tant qu’artiste mais en tant que célébrité. Il n’est pas rare d’entendre ou de lire un « Kanye West c’est de la merde » venant de personnes n’ayant sans doute jamais écouté ses albums. Il suffit de voir sa marionnette des Guignols ou encore les levés de bouclier suite à la rumeur d’un possible album hommage à David Bowie pour comprendre que le grand public l’assimile à une énième star pour ado décérébré. Alors oui, les décérébrés sont nombreux à l’aimer (allez jeter un oeil aux réactions sur Twitter concernant SWISH, son album de 10 titres) mais je pense qu’il faut rappeler que chacun de ses albums est hautement considérés par la presse musicale et les critiques en tout genre. Ce qui n’est pas le cas de Justin Bieber (que Michael-dieu-Jordan nous en préserve).
Kanye West est née le 8 juin 1977 ….. et on s’en fout.
Kanye West est avant tout un producteur. Il a commencé à percer en tant que ghost-producer pour Deric « D-Dot » « The Maad Rapper » Angelettie, célèbre prodo des 90’s, notamment chez Bad Boy Records. Mais c’est surtout son arrivée chez Roc-A-Fella au début des 00’s qui l’a propulsé. Le label de Dame Dash et Jay-Z domine le rap game et Kanye n’y ai pas pour rien. Ses prods à base de sample soul pitchés est la marque de fabrique du label. Freeway, Beanie Sigel, Memphis Bleek puis Cam’ron et ses Diplomats vont joyeusement en profiter. The Blueprint est le déclencheur du mouvement. Un des « classiques » de Jay-Z (débat ? pas débats ? je plaisante ! je plaisante ?). West produit 5 des morceaux de l’album et devient hype comme s’il avait produit tout l’album. Mais il ne compte pas se contenter d’être un simple producteurs et surfe sur la vague. C’est le début de Kanye West le MC.
Chez Roc-A-Fella personne n’est trop chaud pour le laisser rapper. Mais lui n’écoute personne et reste motivé (pas surprenant vu d’aujourd’hui). Through The Wire, premier morceau, première histoire. Il enregistre le morceau peu après avoir survécu à un grave accident de voiture. Mâchoire détruite mais il va en studio et enregistre son premier gros carton composé avec sa MPC sur son lit d’hopital. On à l’impression qu’il bouffe des saucisses en rappant mais ce morceau lui apporte un début de respect de la part de ses collègues de bureau. Le prochain gros projet du label sera donc The College Dropout le premier album de Kanye West.
2004 –The College Dropout
Son premier album, donc. Un coup de maitre. Dès ce départ, il se démarque de la meute. On y retrouve bien évidement sa touche caractéristique de l’époque avec ses samples soul pitchés mais l’ensemble se démarque clairement de ce que l’on avait l’habitude d’entendre sur le label. Plus léger, plus mélancolique. On est loin de l’imagerie véhiculée alors chez Roc-A-Fella. La pochette à l’ours donne le ton. Kanye est dans sa période sac-à-dos. Common, Mos Def, Talib Kweli sont présent en plus des locaux que sont Jay Z ou Freeway. et de ses proches GLC et Consequence. Ludacris, Twista, Jamie Foxx sont là aussi. Le casting a de la gueule et donne une bonne idée sur ses influences. Chicago, la soul et le clinquant. A coté de ça, le mec n’est pas mauvais derrière le micro. Ce n’est pas un génie mais il a le mérite d’avoir un flow identifiable et non linéaire. Il a clairement envie de briller et ça se voit. Cet album plus que bien accueilli marque alors le début de la trilogie à « l’ourson ». Période que l’on peut qualifier aujourd’hui de « pré-implosion ». A l’époque, même si les critiques hors hip-hop remarque le bonhomme, il reste encore un rappeur. Il va confirmer ça avec son deuxième album paru en 2005.
2005 – Late Registration
sort un peu plus d’un an seulement après ses débuts. Pour beaucoup son meilleur LP. On y retrouve la touche soul mais cette fois globalement épurée des pitchs. Plus rythmique, moins synthétiques. L’ensemble est plus simple, plus pur. Joliment mis en valeur sur Late Orchestration, l’album live sorti un peu plus tard. Le casting est du même acabit que sur The College Dropout. Mais un invité interpelle. Adam Levine de Maroon 5. Kanye commence à voir ailleurs. Est-ce une indication pour la suite ? Ce qui est sûr après avoir écouté cet album et vu le live, c’est que Kanye West est un perfectionniste. Et il a l’air de prendre autant de plaisir à travailler l’image que le son. Le dernier acte de cette trilogie est un pas un plus en avant mais aussi un premier pas de coté.
2007 – Graduation
Kanye et 50 Cent se tirent la bourre par média interposé. 50 est encore big à l’époque. Bien plus que le petit West. Pour faire rapide, les deux se lancent un défi. Le 11 septembre, chacun sortira son album et celui qui en vendra le moins prendra sa retraite. Kanye est loin d’être le favoris tant Curtis est énorme à l’époque. Bizarrement, les deux vont sortir un album plus pop que ce qu’ils avaient sorti jusque là. Le gros sample de Daft Punk sur « Stronger » (qui annonce « Graduation ») est pour le moins déroutant pour ceux attendant impatiemment ce troisième album. C’est ultra efficace mais nous sommes bien loin de ce à quoi il nous avait habitué. Le monde à peur. Mais 50 Cent sort une purge calibrée pour servir de bande son à un épisode des « Marseillais à la bibliothèque » alors que Kanye arrive malgré les craintes à convaincre son monde. Graduation est radio-friendly. C’est une évidence. La pochète, signé Murakami, est mignonne et le disque se veut inspirant (vous savez comme les messages que votre cousine pas futé poste à longueur de temps sur Facebook). Attention, l’album n’est pas mauvais, bien au contraire. C’est juste qu’il est différent. Les premiers détracteurs arrivent. Ce qui est accompagné (comme c’est souvent le cas) de l’arrivé des critiques plus généralistes voir indés. Kanye West vient d’entre ouvrir une porte quitte à en refermer une autre.
C’est le début de « l’implosion ». Le début de Kanye l’artiste qui remplace Kanye West le simple rappeur. Ah, et sinon, 50 Cent n’est donc pas un homme de parole. Et quand l’on voit sa piètre disco depuis, c’est bien regrettable.
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