Si sur disque Nosfell ne laisse pas indifférent, en live il subjugue. Retour sur l’escale palpitante de l’ovni frenchy au Château Rouge d’Annemasse.
« On ne pourrait pas dire que c’est un mélange de ça et de ça. (…) Ils vont chercher un point complétement ailleurs, quelque chose qui ressemblerait à rien. Ça c’est intéressant. »
Les propos d’Alain Bashung résument avec justesse la substance de cette formation à part. Nosfell ne ressemble à rien et c’est précisément ce qui le rend si riche. Si passionnant. Plus encore sur scène où le spécimen mêle musique, poésie, danse et spiritualité.
L’ouverture de la soirée revient à Pelouse. Trio lyrique et fantasque pourvu d’un état d’esprit résolument rock. Leurs chansons sont prétextes à des histoires que l’on écoute avec un intérêt amusé.
Xavier Machault explique pourquoi les rats arrivent en ville, conte les mésaventures de celui qui n’a pas son ticket. Tout aussi décalé qu’attrayant. D’autant que ses comparses assurent à coups de violoncelle vitaminé et saxo nerveux, sous obédience electro. Pelouse fournit une introduction idéale au monde chimérique de Nosfell.
Nosfell tient incontestablement du reptile. Quelque chose entre le caméléon pour les reflets musicaux multicolores. Et le serpent dans sa manière de se mouvoir, ondulations voluptueuses, dans ses mues perpétuelles. Au fil des albums, d’une tournée à l’autre.
Après des concerts en solitaire au printemps dernier, Nosfell revient sur scène dans une configuration trio. Avec la priorité donnée à « Echo Zulu » qui, au final, sera joué dans son intégralité. Ce dont on ne se plaindra pas tant ce dernier opus est taillé pour le live. A l’instar de l’introductif « Ricochets », plongée immédiate dans le bain.
En live, le relief musical s’épaissit. La guitare électrique s’exprime ouvertement tandis la trame electro claque (« Les rois »). Sans compter ce saxophone taille XXL insufflant des atmosphères exacerbées. Chaleur grave et rocailleuse sur « Les gorges ». Dancefloor funky jouissivement décomplexé sur « The Party ». Un final durant lequel Nosfell descendra de scène pour se trémousser avec son agilité coutumière au milieu du public. Le sourire aux lèvres, le regard malicieux.
Moins abstrait et délirant qu’à ses débuts, cet artiste hors norme n’a rien perdu de son esthétique. Vocale comme visuelle. Son corps et ses contorsions deviennent langage, sa voix captive par ses sonorités parfois improbables. Généreux, bouillonnant d’énergie (la version pêchue de « La ressasse »), il sait également puiser la profondeur dans la quiétude acoustique. Revisitant en rappel solo son incontournable « Mindala jinka ». Juste la guitare et sa voix murmurée.
Chaque concert de Nosfell se révèle une expérience nouvelle. Une règle prodigieuse à laquelle cette soirée intimiste et kaléidoscopique au Château Rouge n’aura pas dérogé.
Setlist :
– Ricochets
– The Hunter’s Bed
– Les rois
– La blessure
– Bargain Healers
– Rubicon
– Le corps des songes
– Les gorges
– The Letdown
– The Short – Timers
– La Ressasse
– The Artefact
– The Party