Avec son troisième album « Avant/Après », Judah Warsky manie, avec talent et spleen, pop française et électronique de salon.
La pop électronique à la française se porte décidément comme un charme. Nouvel exemple avec Judah Warsky et son troisième album « Avant/Après ». Ancien membre de Los Chicros et Turzi, le Parisien cultive depuis le début de la décennie une musique singulière qui navigue entre chanson française et électronique pointue. Cinq ans après « Bruxelles » (malgré le EP « Seul » en 2015) qui succédait lui-même à « Painkillers and Alcohol » (et la déchirante chanson du même nom), il revient dans la danse avec un disque qu’il qualifie lui-même de « variété sous MD » ce qui colle plutôt bien à l’objet. Une sorte de musique de club pour soirées à la maison.
Ce coéquipier de Maud Geffray et Flavien Berger au sein de la brillante écurie de Pan European Recording s’est donc adjoint cette fois les services de membres d’Acid Arab (dont son frère fait partie) à la production et mise beaucoup sur le piano. De quoi offrir un disque dense (8 titres) et varié où le vague à l’âme domine dans des paroles qui alternent entre français et anglais tout en survolant de touchantes mélopées électroniques.
Bordé par l’ouverture « Before » et la conclusion « After » qui se répondent en miroir dans de lentes processions, au piano pour le premier puis synthétique pour le second, « Avant/Après » bat son plein au cœur de l’album (de la soirée ?). La belle mélodie pop du premier single « La Voiture Ivre » est bien entourée. Mais il faut de l’audace pour mêler notes house et chant variété (sous MD pour le coup) sur le très réussi « Je m’en souviendrai jusqu’à la fin de ma Life » ou d’accoucher le fruit d’une coucherie improbable entre Lou Reed et Katy Perry sur le grandiloquent « Like In a Musical ».
S’il se prête aussi à l’exercice périlleux de la « chanson française » de façon plus (« Apporte-moi l’oubli ») ou moins (« Les oiseaux l’ont mangé ») convaincante, Judah Warsky tape complètement dans le mille avec « I would not fear i would not cry ».
Pendant près de 10 minutes entre notes de piano et touches de synthé analogique, cette longue et tortueuse montée plus propice au canapé qu’au dancefloor se place comme le grand moment de bravoure du disque. Et ce fan de Laurent Voulzy à la connaissance musicale encyclopédique de se faire une place dans le cercle dur des artisans d’une pop française élégante et inventive dont Sébastien Tellier pourrait être le saint-patron.