Benjamin Biolay cartonne avec son dernier album. Un succès qui fait plaisir au regard de sa carrière. Mais néanmoins la question se pose : « Grand Prix » est-il un grand disque ?

« Grand Prix », ou l’hommage de Benjamin Biolay à la formule 1. Plus précisément au jeune pilote Jules Bianchi, décédé en 2015 des suites d’un grave accident de course. De cette chanson ont découlé le titre du disque ainsi que sa trame conceptuelle. Avec pour conclusion le mélancolique « Interlagos (Saudade) ». Duo (avec sa fille Anna) faisant honneur à Ayrton Senna.
Voilà pour la genèse de ce neuvième opus studio. Mais quid du contenu ?

Un départ en pole position
« Grand Prix » amorce idéalement son départ. « Comment est ta peine ? », le premier single, cristallise une réussite longtemps recherchée, parfois effleurée (cf le titre « Qu’est-ce que ça peut faire ? »). Celle d’un véritable hit estampillé Biolay. « Comment est ta peine ? » offre ainsi la combinanison idéale de son savoir-faire : mélodie entêtante, orchestration imparable, répartie féminine (celle d’Anaïs Demoustier), spleen prégnant mais non plombant. Et puis le chant est posé, assumé… enfin !
Difficile de maintenir une telle vitesse de pointe pour un disque qui démarre sur les chapeaux de roue. Pourtant les titres suivants ne pâtissent pas d’une décélération notoire. Grâce notamment à un virage rock plutôt bien négocié. Puisant autant dans le large spectre anglo-saxon (l’entraînant « Papillon noir » légèrement teinté new wave). Que dans la pure tradition française, à l’instar du très bon « Idéogrammes ».
Si le chanteur pilote Lyonnais reste pied au plancher, il n’en lèse pas pour autant les mots. Exploitant généralement avec brio cette prose singulière dont il a fait sienne. Blasé mais non dénué de sagacité sur « La roue tourne ». Son sens aigu de la métaphore se ravive sur « Comme une voiture volée ». Alors qu’il déploie son talent romanesque le temps du single « Vendredi 12 ».
Défilant à plein régime, « Grand Prix » finit tout de même par accuser quelques toussotements. Principalement la (trop) flagrante facilité de « Souviens-toi l’été dernier », que la voix de sa fidèle complice Keren Ann ne rendra pas plus piquant. Un affaissement des tours/minutes loin de faire caler le moteur. Quant à son péché mignon, Benjamin semble le canaliser mieux que jamais. Marque de fabrique oblige, les orchestrations restent consistantes. Mais harmonisées, voire relativement dépouillées (la ballade autobiographique « Ma route »). Au bénéfice d’une mesure souvent juste.
Foncièrement pop mais boosté au rock, « Grand Prix » tient donc la distance. Sans atteindre l’acmé de « La Superbe » qui demeure (définitivement ?) le chef d’œuvre de Benjamin Biolay, ce disque carbure. Et mérite amplement le succès qu’il remporte actuellement
#ArrivéeSurLePodium
Benjamin Biolay – Grand Prix / Disponible chez Polydor.