Damn !! Après avoir raillé la campagne d’Apple autour du dernier album “imposé” de U2. Kendrick Lamar se réconcilie avec U2 et les invite même sur son très attendu quatrième album.
Souvenez vous, c’était en 2014 pour la sortie “intégrée iTunes” du dernier album en date de U2. Tous les utilisateurs d’Iphone l’ont reçu automatiquement sur leur smartphone, même ceux qui n’avait rien demandé.
Alors Kendrick Lamar s’était fendu que quelques tweets enflammés et légèrement insultant sur le sujet. Il faut bien avouer que c’est bien la première fois qu’un “album spam” voyait le jour. Le leader de U2, Bono s’est d’ailleurs excusé par la suite. Et plus encore.. On pensait que tout les opposait voila U2 qui ressurgit sur Damn, l’album de Pâques.
Kendrick Lamar et U2, un drôle de featuring.
Crevons l’abcès tout de suite concernant cette collaboration inattendue: Pour les uns Le titre XXX. Featuring U2 est une grosse déception; Bono chante 2 fois le même couplet (quasiment). Et oui, ça peut apparaitre un peu léger pour une collaboration annoncée jusque dans le Figaro. Et puis U2 ne se limitant pas à Bono, la guitare de The Edge reconnaissable à des kilomètres était elle aussi attendue. Un feat. est l’occasion de marier deux univers, ou à la limite qu’un des 2 acteurs sorte de sa zone de confort.
Ceux qui imaginait déjà Kendrick rapper sur un arpège baignant dans un effet Delay avec Bono qui reprenait les choeurs ou mieux se lançait dans un slam ecolo… peuvent s’assoir sur leurs désirs. Et depuis quand les grands artistes font ce que les gens veulent ou attendent? Donc pas questions de s’attendre à la juxtaposition d’un couplet de rap sur un morceau de U2. C’est Kendrick qui invite, il fixe les règles.
Kendrick Lamar est au sommet de son art depuis quelque temps. En plus il est aimé et artistiquement apprécié de tous, y compris les rockers, et maintenant des vieux ! C’est confirmé, ET en préambule et en deçà de cette anecdote futile, ce n’est pas facile de passer derrière un album aussi magistral et parfait que “To Pimp A Butterfly“ . Un des album de la décennie à ce jour. Ces petits miracles de l’histoire de la musique. Alors soyons indulgent et humble. Pour autant…
A-t-on le droit de dire que Damn de Kendrick Lamar est juste bon?
Kendrick Lamar – Damn: Classique,Légendaire, meilleur album de l’année, Oscar du meilleur album, 4 étoiles au guide Michelin… On peut en discuter calmement?
Difficile apparemment tant le 4ème album de King Kendrick Lamar signé sur Aftermath (Label de Dr Dre) semble faire l’unanimité sur la toile. Et pourtant il semble nécessaire de prendre un peu de recul. Déjà car il est ridicule de faire une classique un album qui a tout juste 3 heures d’existence. Tout comme il est ridicule d’écrire un article à la hâte sur un album plus complexe qu’il n’en a l’air. L’épaisseur du talent et de la vision de Kendrick Lamar nécessite qu’on lui laisse un certain temps de décantation. Tel un bon vin.
Il faut aussi reconnaitre que focaliser notre attention sur de vieux rockeurs qui s’agenouillent devant le nouveau roi du son serait réducteur. Kendrick Lamar a la force et l’intelligence de savoir s’entourer. On retrouve des personnes très brillantes issues d’horizons et de notoriété diverses sur Damn; Comme James Blake, les Canadiens BadBadNotGood et des producteurs de rap tel Top Dawg et 9th Wonder, The Alchemist sans oublier The Internet, Rihanna et Zacari.
Il serait bien malhonnête de qualifier Damn de mauvais ou moyen.
Mais écoutons donc de plus près ce quatrième album au coeur de l’actualité de ce printemps. Et pour commencer l’album est bon! Il serait en effet bien malhonnête de qualifier ce disque de mauvais ou médiocre. Le flow de Kendrick Lamar est toujours bien au dessus du lot et il le confirme en 14 pistes. On retrouve également la plume affûtée du rappeur.
La fable tragique d’introduction (allégorie de l’Amérique), Fear. décrit la peur ressentie par les jeunes des quartiers ou encore Duckworth que Kendrick dédie à son père, le rappeur est toujours maître dans l’art de manier les mots sur des vrais sujets. Un peu comme cette ultime artwork, la simplicité de la culture hip hop est omniprésente. Humble fidéle à elle même. Humble est d’ailleurs un titre qui fait partie des moments fort du disque par son contraste, sa “pauvreté”. Humble cadre bien les choses. Fidèle au contexte.
Avec Damn, Kendick Lamar tire le rap vers le haut et par là même tire le monde vers le rap.
Sur le plan instrumental on a évidemment plein de bonnes choses à se mettre dans l’oreille. On peut également ressortir Pride. produit et chanté par le petit génie Steve Lacy membre de the Internet. Ce morceaux lancinant fait même penser à la pop éthérée de Conan Mockasin.. Feel, Lust Fear et le titre Duckworth qui clôt parfaitement l’album avec ses variations oldschool travaillées par 9th Wonder autour d’une chanson soul des années 70 (Ted Taylor – Be Ever Wonderfull). Damn est définitivement plus sobre et moins fou fou que sur To Pimp A Butterfly et ses chutes jazzy.
D’autres point empêchent de crier au miracle: Des titres passables et une pochette qui ne l’est pas moins; Façon mixtape ou street album un peu cheap. On peu aussi être circonspect avec certaines productions “basiquement hip hop” comme Element et son piano mélancolique, ou le duo Loyalty avec Rihanna; Mais la seconde écoute achève tout scepticisme. C’est du bon! et du très bon par moment.
On peut penser que “trop de titres ne reposent que sur le flow de l’artiste..” C’est oublier que c’est son album et que ça reste du rap. Le charme de Brassens reposait-il essentiellement sur sa guitare. Le gars fait du rap et il le fait bien. En tout cas mieux que 90% des sorties du jeu actuel. Kendrick Lamar est un humble être humain devant l’éternel qui restent à un très haut niveau d’exigence artistique.
#entreenferetdamnation*
Kendrick Lamar – Damn / date de sortie le 14 avril 2017 chez Aftermath
*:étant assez inculte en terme de religion. Nous avons totalement omis d’évoquer cet aspect de cet album pascal.