Le premier album de Kelly Lee Owens distille une musique électronique parfois dansante, parfois planante et portée par une voix envoûtante.
Il n’est pas étonnant d’apprendre que Kelly Lee Owens a d’abord travaillé chez un disquaire londonien avant de se lancer dans la composition de musique électronique. Son éponyme premier album a des allures de creuset ayant puisé dans les différents bacs à disques des sons, des textures, des climats qui viennent se tamponner avec une cohérence assez étonnante.
Couvée par Dan Avery, Jenny Hval ou Ghost Culture, la Galloise de 29 ans qui affirme écouter de la musique en permanence a donc choisi de ne pas choisir pour ses débuts. Pas vraiment pop dans la structure de ses morceaux ; pas totalement techno non plus même si elle n’hésite pas à envoyer des passages très « club » ; pas complètement planant malgré des passages très zen avec ses inspirations tibétaines. Agrémenté de multiples samples pris dans le quotidien comme celui des oiseaux du jardin de ses parents au Pays de Galles, son album affiche dès lors un charme véritablement hybride et singulier.
Il n’est donc pas étonnant non plus d’apprendre que la Britannique voue un culte au génial violoncelliste américain Arthur Russell à qui elle dédie un titre (« Arthur »). Elle partage avec ce pionnier des expérimentations électroniques une grande liberté qu’elle essaime dans les 10 titres de « Kelly Lee Owens ».
Si les premières mesures prêtent plutôt à la rêverie (« S.O ») et aux ambiances liquides (« Arthur » forcément), Lee Owens monte aussi le tempo avec finesse. Sa collaboration avec l’autre défricheuse Jenny Hval « Anxi. » est sublime avec ses harmonies de voix éthérées. Il y a de la dream pop américaine dans les lignes vocales de « Throwing Lines » et même du sitar dans la longue clôture « 8 ».
De la séance de méditation à la chaleur poisseuse des clubs en piochant encore dans la house et l’acid (la fin de « Lucid », « Evolution », « CBM »).
Des montées et une redescente glaciale avec le très beau « Keep Walking ». Là où l’orgue du « Che » de Suicide percute le « Drop » des aînés de Massive Attack (dont le Mezzanine pourrait être un lointain ancêtre de ce disque). La voix de Kelly Lee Owens rappelle alors celle de Liz Frazer (Cocteau Twins) qui avait collaboré à l’époque avec les Bristoliens.
Il y a donc beaucoup de choses dans ce premier album qui brasse les atmosphères mais dévoile une artiste dont le talent permet de s’affranchir des différentes paroisses sans tomber dans la récitation studieuse.