LCD, nostalgique Soundsystem
Six ans après une séparation en fanfare, LCD Soundsystem revient avec”American Dream”, un quatrième album mélancolique et réussi.
Fait rare en la matière, la sortie de piste de LCD Soundsystem en 2011 fut parfaite. Un dernier disque réussi («This is Happening » 2010), un concert d’adieu dans un Madison Square Garden bondé et un documentaire in situ (“Shut Up And Play The Hits”) décrivant les derniers instants du groupe… Mais, six ans plus tard, le baisser de rideau orchestré avec minutie par le leader James Murphy a vécu.
En amateur monomaniaque de musique, la tête pensante de LCD Soundsystem a craqué après une reformation pour une série de concert en 2016. Et finalement un quatrième album en 2017 : Un « American Dream » de près de 70 minutes où le titre le plus court dure cinq minutes. Il faudra passer sur l’ironie d’une pochette (volontairement ?) hideuse et ensoleillée. Soit l’exact inverse de ce que propose le disque lui-même.
Comme le rappelait récemment les médias américains, James Murphy a vu pas mal de ses idoles (Alan Vega, Lou Reed, Leonard Cohen, Prince, David Bowie) rejoindre l’au-delà depuis la combustion spontanée de son groupe. Ceci ajouté à la cinquantaine approchante et à une récente paternité, l’aspect festif et dansant de sa musique s’est évanoui. Celui des chantres de l’electro-clash qui furent avec Arcade Fire et les Strokes, l’un des trois plus grands groupes « indé » des années 2000.
La véritable question qui se pose alors est de savoir si LCD Soundsystem a encore quelque chose à dire et à proposer en 2017 ?
Dans les textes, c’est un James Murphy désenchanté qui se présente. Se lamentant sur des amitiés perdus, des amours disparus et sa rencontre avec Bowie qui plane tel un spectre au-dessus de l’album. C’est le thème du très planant dernier morceau « Black Screen » où il évoque sa participation abrégée – car envahi par la peur – au dernier disque de l’Anglais avant sa mort, « Blackstar ». Des paroles qui imprègnent un album très sombre si on le compare à la machine à danser des débuts.
Le son proposé est, lui, toujours aussi référencé. Le groupe ne s’en est jamais caché. Il puise dans l’âge d’or new-yorkais de la fin des années 70 et du début des années 80 et plus globalement toute la veine post-punk. Quitte à parfois passer pour une sorte de “groupe-hommage”. Si la paire Eno / Talking Heads s’entend trop sur « Change yr Mind », qu’il faut passer sur un « Emotionnal Haircut » sonnant excessivement comme Joy Division ou le Bowiesque à outrance « Call The Police », il y aussi des appropriations réussies. Sur « Other Voices », ESG ou Liquid Liquid sont convoqués dans un « funk blanc » jubilatoire avec la voix féminine de Nancy Whang quasiment rappée. Dans le même genre, Suicide survole le morceau d’ouverture « Oh Baby » avec mesure.
Mais comme cela a toujours été le cas avec ce groupe, c’est quand il joue son propre son qu’il est le plus intéressant. À l’image du très dansant « Tonite » qui renvoie aux tubes comme « Losing My Edge », c’est dans ces titres longs mixant punk / disco / dance que LCD a façonné sa légende. (« Home », « All My Friends », « Get Yourself Clean »). C’est le cas du véritable moment de bravoure de l’album qu’est « How Do You Sleep ? ». Soit 9 minutes de montée élégiaque d’abord sous un violoncelle que ne renierait pas le John Cale du Velvet puis une envolée de synthés martelés avant l’envolée finale jouissive.
« American Dream » a sa place dans la discographie des New-Yorkais et valait leur retour. Car, même s’il est encore une fois trop sous influence, c’est Bowie lui-même qui apporta la meilleure des réponses. Quand James Murphy lui avouait avoir tout copié sur lui, le Thin White Duck lui répondait en bon Anglais : « On ne peut pas voler un voleur, Darling ».
LCD Soundsystem – American Dream / date de sortie : 01/09 2017 (DFA/Columbia)
#JamesMurphyisplayinginmyhouse