A défaut de se prendre la tête, les membres de LINGUS ont le crâne bien rempli. Géniteur de deux EP très prometteurs, le jeune groupe se révèle à l’image de son (autoproclamé) rock hybride : ouvert, audacieux, structuré mais aucunement prétentieux.
Portrait dressé en dix questions d’un trio fonctionnant en totale démocratie. Et qui carbure au plaisir.
MusiK Please : Tout d’abord une présentation s’impose !
LINGUS : Salut MusiK Please ! Nous sommes LINGUS, un trio stéphano-lyonnais de rock qu’on qualifie d’ « hybride ».
Ce nom de groupe qui fait songer à un titre de Snarky Puppy, il possède probablement une signification particulière ?
Tu tapes dans le mille ! C’est un hommage à ce collectif de musiciens qu’on admire particulièrement tous les 3, notamment dans sa capacité à agréger plein de styles de musique et d’en faire un mélange magnifique. Eux ont plus une base jazz que rock. On est donc incapables de jouer ce qu’ils font, mais c’est aussi pour cela qu’on est super admiratifs de leur musique à la fois super accessible en tant qu’auditeur mais injouable en tant que musicien ! ;-).
Et la dimension collective de ce groupe nous parle également beaucoup dans le sens où chacun apporte sa pierre à l’édifice musical.
Votre musique reflète un caractère très composite. Comment la définiriez-vous ?
En fait rock « composite » ça sonnerait presque mieux que rock « hybride », belle formule ! Tu nous as bien cernés. Sans vraiment calculer la chose, on est tous les trois sensibles à plein de styles musicaux différents, même si la base reste rock. On aime pas mal de choses dans le jazz, l’électro, la musique traditionnelle, la pop, le rock « mainstream » comme « underground » ; deux mondes qui semblent inconciliables mais qui pour nous ne le sont pas. On peut triper de la même façon sur un riff de stade de Muse comme sur du math rock complètement épileptique…
Quelles sont vos influences principales ?
Bah du coup multiple. On peut citer les classiques type Beatles, Muse, RATM, System of a Down, Radiohead, Queens of the Stone Age, Deftones, Mr Bungle et autres… Les influences jazz : E.S.T., Gogo Penguin, Snarky Puppy, Forq, Bokanté, Knower, Erik Truffaz, Ibrahim Maalouf, Jason Lindner, Frank Zappa, Christian Scott etc…
Et divers groupes du circuit estampillé « rock underground »: Totorro, La Colonie de Vacances, Marvin, And So I Watch You From Afar etc… Plein de choses en fait, c’est toujours compliqué d’en faire une liste exhaustive…
Comment s’opère le processus de composition/production chez LINGUS ?
Très simplement. Aucune figure de leader « artistique » comme aiment à construire les exégètes de l’histoire de la musique. Nous sommes 3, donc nous composons à 3. Évidemment comme nous jouons des instruments différents, chacun apporte différemment : ça peut partir d’un riff de guitare, de basse, ou une mélodie composée au clavier. Mais rien de très poussé avant que l’on s’en empare tous les 3 en répétition : c’est là véritablement que les choses prennent forme. Nous avons tous les 3 notre mot à dire sur chaque morceau, structure, instrument etc… et contrairement à ce que nous raconte la mythologie musicale (« il faut qu’il y ait un leader sinon c’est le bordel ! »), ça marche très bien comme ça !
À vous écouter, il semblerait que vous vous éclatiez vraiment à jouer…
C’est clair ! Pour nous, c’est un super plaisir de jouer tous les 3 ensemble, nous avons vraiment de la chance de nous entendre musicalement comme humainement. Il y a un truc du lâcher-prise collectif qui est vraiment jouissif ! Quand on joue tous les 3, il y a une espèce d’énergie qui fait qu’on se sent d’un coup beaucoup plus forts, c’est comme si rien ne pouvait nous arriver à part tout lâcher !!
L’insertion d’extraits de dialogues du film 12 hommes en colère sur le titre « Café crème »… d’où vous est venue cette idée ?
On aime bien l’idée d’intégrer des « discours » dans notre musique, d’autant plus en français pour nous qui chantons en anglais. Ça change et c’est beaucoup plus explicite pour le public, qui pour l’instant, est surtout français ! On aime en fait les belles punchlines, ça se met bien en musique ! On l’avait fait dans le premier EP avec des extraits de La Société du Spectacle de Guy Debord (sur le titre « Guy2Sides »), et on voulait réitérer l’histoire.
Là, le film 12 hommes en colère s’inscrit parfaitement dans la thématique de l’accélération du temps qui structure notre nouvel EP (« Acceleration ») : l’idée d’une injonction à une décision rapide (en l’occurrence dans le cadre d’un procès) qui poursuit l’injonction à l’urgence qui gouverne nos société contemporaines. Il y a bien sûr toujours un message politique derrière ces discours en français.
Le long format, c’est pour quand ?
Peut-être pour le prochain opus du groupe ! Franchement on ne sait pas trop, on verra en fonction de notre créativité, si le long format se prête aux prochaines compositions du groupe ou bien si l’on reste au format plus réduit de l’EP. Sachant que comme nos morceaux sont souvent assez longs, un 5 titres peut être l’équivalent temporel d’un album !
Quels sont vos coups de cœur musicaux respectifs du moment ?
Bah là je crois qu’on a tous bloqué sur un groupe qui s’appelle Forq, dont les membres sont en partie composés des Snarky Puppy : là encore une musique assez hybride.
On s’est pris aussi une belle claque récemment en allant voir Magma en concert, c’est vraiment un truc assez hallucinant à voir en live : une musique très curieuse mais complètement fascinante. En première partie, on a fait aussi une belle découverte jazz barré zappa-esque avec Thomas de Pourquery. Après on a aussi vu d’autres trucs de la nouvelle génération jazz actuelle genre Foehn Trio, Mammal Hands etc…, qui nous bottent bien.
Et enfin dans la mouvance rock, il y a aussi l’énergie du jeune groupe Lysistrata qui est assez impressionnante à voir sur scène. Bref encore une fois, plein de choses…
Que peut-on souhaiter à LINGUS pour la suite ?
Et bien de durer tout en se faisant plaisir, et pourquoi pas en grossissant un peu afin de faire de plus en plus de belles scènes car le live c’est ce qu’on préfère !