« 2001 » Dr. Dre, 20 ans
Rétrospectivement, que vaut le second album de Dr. Dre, « 2001 » paru il y a… XX ans ?
Bon, je crois qu’il est temps. Dre, N.W.A, musique, cinéma … Dr. Dre est revenu dans la lumière et vous n’avez pas pu y échapper. « Compton » (chroniqué ici), nouvel album, zéro clip, zéro single. La communication est essentiellement passée par « l’internet mondial ». En 2015, ce n’est bien-sûr plus une surprise. Et c’est pourquoi il est temps. Temps de revenir à « 2001 », enfin, je veux dire à 1999. L’époque « sans internet », sans Jackie & Michel, l’âge de pierre.
7 ans après « The Chronic », son premier solo post-N.W.A, ce bon vieux Dr. Dre décide de se lancer dans sa deuxième « aventure solo » (non aucune allusion tirée par les cheveux aux deux personnages citées plus haut) ou plutôt de se relancer après l’accueil pour le moins mitigé d’Aftermath, l’album de présentation de son très attendu nouveau label après le légendaire mais sulfureux Death Row Records. « Been There, Done That », nous clamait-il à l’époque et ce n’était pas franchement convainquant. Sur cet album, des invités prestigieux certes mais aussi nombres de nouveaux talents disparus depuis dans les méandres du cabinet du docteur sans que personnes ne s’en plaigne. Et on ne peut pas dire que les productions de cette entrée en matière aient non plus marqué les esprits. Bref, «Been There, Done That », c’est après cette sortie qu’il fallait le dire Dédé.
1999, donc. Le nouveau chouchou de l’Amérique hip-hop est un petit blanc de Detroit … lancé par Dr. Dre. Ne nous mentons pas, si Eminem a cartonné avec « My Name Is » et à attiré autant l’attention c’est bien par parce que c’était le nouveau poulain du doc. Moi le premier, j’ai sauté sur ce « Slim Shady LP » non pas en me disant « il a l’air bon ce type » mais plutôt « Aaahhh, enfin une nouvelle sortie de Dre ». Je n’y ai pas reconnu le Dr. Dre que j’aimais mais j’ai adhéré. A mon avis, le meilleur album du blondinet avec « The Eminem Show » (oui, j’ai été déçu par « The Marshall Mathers LP »). Son nouveau « Snoop Doggy Dogg » devient alors un phénomène artistique mais aussi de société et Dre se sentant sur une bonne vague repart en studio et se lance dans une tache qu’il n’a jamais véritablement aimé. Enregistrer un album solo. Dr. Dre est un producteur avant tout, pas un MC. Mais il y a pris goût au micro avec N.W.A et les textes écrits par Ice Cube et The D.O.C.. « Express Yourself » sur le premier LP du groupe de Compton était son premier morceau solo. Il y déclarait ne pas fumer car cela faisait perdre le contrôle de soi. 3 ans après, il sort « The Chronic ». T’es un sacré déconneur Dédé.
« 2001 », donc. Une gifle, « Still D.R.E. » sifflait dans les têtes. Des hymnes difficiles à oublier. Snoop de retour dans sa niche, Eminem la nouvelle idole est évidement là et plein plein plein d’autre. Vous vous rappelez d’Hittman ? Lui non plus ! Bon, pour faire court, cet album a marqué sa génération de façon instantanée. Les admirateurs de la première heure n’ont pas été déçu et un nouveau public est venu s’y greffer. Mais un album doit être jugé dans le temps. Un grand disque s’écoute toujours avec autant de plaisir 5,10, 20 et 100 ans après. Nous sommes en 2015. 16 après « 2001 » (oui, je sais, ne sortez pas vos calculettes, c’est bizarre mais c’est comme ça).
Alors que vaut VRAIMENT « 2001 » en 2015 ?
La première question à se poser est : « Est-ce que vous le réécoutez encore aujourd’hui ? ». Ne tournons pas autour du pot. Non. Bien-sûr que certains morceaux font encore tourner la tête mais dans la longueur est-ce le cas ? Non. L’album est encore bon, il n’y a aucun doute mais certains passages sont clairement devenus anecdotiques. Nous avons tous en tête ces bangers imparables que sont « Still D.R.E » ou « The Next Episode » et nous ne gardons que ça en tête au moment de parler de cet album. Mais que vaut vraiment le reste ? Cela vous fait-il encore vibrer ? Je serais surpris. Le minimalisme des productions en est la cause. Paradoxalement, le minimalisme des prods de Dr. Dre, quand la magie est là, est ce qui donne ce coté spectaculaire totalement dévastateur. Mais quand la baguette est cassée ? Et bien cela donne des morceaux plats et finalement pas si intemporels. Par exemple « What’s the Difference » a pris un sacré coup de vieux. Et ce n’est pas les morceaux low-tempo qui font repartir la machine. A l’époque cela fonctionnait. Ces morceaux étaient l’occasion de souffler entre les uppercuts et donnaient du volume à l’ensemble. Mais en vieillissant, le boxeur frappe moins fort et plus besoin de répit. En comparaison « The Chronic » est encore une véritable lessiveuse. Tout continu d’en sortir avec sa blancheur originelle.
Attention, ce n’est pas parce qu’il ne résiste pas parfaitement à l’usure du temps, que cet album est mauvais. Non, il n’est juste pas aussi bon que certains aiment le dire. Doit-il être considéré comme « un classique » (le hip-hop aime bien classer les classiques) ? Là, ça devient coton parce que beaucoup d’entre vous vous fondre en larmes.
NON, « 2001 » de Dr. Dre ne peut pas être considéré comme un classique. Premièrement, parce que, comme je l’ai dit précédemment, l’album n’a pas parfaitement passé l’épreuve du temps (l’épreuve des poteaux, quoi). Et tout simplement, parce que « The Chronic » est bien meilleur en tout points. « The Chronic » étant incontestablement un classique, il n’y pas de possibilité de « classiquage » pour « 2001 ». Je vois mal le Dieu de la musique dire « t’es moins bon que ton grand frère mais je t’accepte quand même au Paradis ». Non ça ne marche pas comme ça là-haut. Tu es un classique ou tu ne l’es pas. Il ne peut pas y avoir de meilleurs classiques que d’autres. Sinon, ça n’en finit pas.
Rétrospectivement, « 2001 » n’est donc pas l’album de Dr. Dre que je choisirais si je ne devais en prendre qu’un pour mettre dans mes écouteurs lors d’un concert forcé de Zaz. Mais il demeure un grand disque. Un de ces disques que l’on écoute aujourd’hui, nostalgique, en se disant « c’était vachement bien ». Il aurait juste fallu pouvoir dire « c’est vachement bien ».