Sur disque, les quatre filles de Savages portent bien leur nom. Sur scène elles le portent mieux, embellissant leur furie studio d’une féminité irradiante et martiale.
Retour sur la prestation du groupe à l’Epicerie Moderne de Lyon.
Savages n’aura pas eu besoin de plus deux albums pour passer du statut de prometteur (Silence Yourself) à celui de révélation. Portées aux nues avec Adore Life, ode rageuse à la vie à l’amour (chronique ici), les anglaises ont déjà scellé l’année 2016 de leur succès. D’ailleurs l’Epicerie Moderne affiche complet depuis longtemps.
Les festivités débutent Bo Ningen, quatuor d’origine japonaise connu des fans de Savages. Les deux formations londoniennes ayant en effet mêlé leur fureur le temps d’un album (Words For The Blinds). Ce soir, Bo Ningen attaque fort et sans détour, à coup de rythmique épaisse. La chevelue frontwoman Taigen Kaawabe démène basse et vocalises tandis que ses 3 acolytes envoient sévère. Punk épicé de psychédélisme, ce show nippon chauffe dignement la salle. Il aurait pu même la régaler avec un minimum de relief sonore.
La classe sobre de la scène allouée à Savages en dit long. A priori, le groupe n’a rien laissé au hasard et va le confirmer avec une remarquable maîtrise. Le set s’ouvre sans fioriture sur un « Sad Person » dosé. Tout de noir vêtues, les demoiselles sont bien en place, prenant néanmoins le temps pour monter délicieusement en puissance.
La pénombre domine entre deux instants de lumière vive. Une atmosphère cyclothymique dont Jehnny Beth se joue pour osciller entre séduction et assauts vers le public. Son fort charisme compense en partie une grosse déception, celle de sa voix engloutie, parfois même imperceptible sous le flot sonore de ses trois complices. Des morceaux comme « I Need Something You » au phrasé si percutant sur disque en perdent de leur emprise. La chanteuse n’en lâchera rien pour autant, finissant même par aller dans la fosse comme elle le laissait présumer depuis le début.
Musicalement, le groupe confirme la rigueur de sa rythmique. Le duo Ayse Hassan (basse)/Fay Milton (batterie) impressionne par cette magnitude que Gemma Thompson s’applique consciencieusement à enrober de ses riffs aiguisés. Mais au-delà de la technique, c’est probablement l’esthétique qui prime. Savages dégage une réelle beauté sur scène. Voire de la sensualité dans les moments les plus déchaînés.
Le rappel arrive bien sûr trop vite mais offrira un final à la hauteur de la prestation. Ôté de son vernis studio « Mechanics » se fait plus organique alors que la basse de velours imprimant les délicieuses circonvolutions d’« Adore » ne devient que plus addictive. Quant à l’ultime « Fuckers » interprété à huit avec les membres de Bo Ningen, il achèvera de conquérir l’auditoire.
« Nous sommes déjà venues deux fois dans les coins et je crois que nous allons revenir ». Aussi intense soit-il, le son live de Savages n’a pas empêché Jehnny d’entendre nos prières…
Setlist :
(Merci à Philippe !)
– Sad Person
– City’s Full
– Slowing Down The World
– Shut Up
– She Will
– Husbands
– Surrender
– Evil
– When In Love
– I Need Something You
– The Answer
– Hit Me
– No Face
– T.I.W.Y.G.
Rappel :
– Mechanics
– Adore
– Fuckers